Le blog de Fabrice ARNAUD

Alexandre Grothendieck : l’Albert Einstein des mathématiques

Pour dire merci….

Avant de commencer, mes CINQ conseils lecture…


Alexandre Grothendieck : l’Albert Einstein des mathématiques

À l’occasion de la sortie tant attendue de Récoltes et Semailles chez Gallimard, voici un petit article au sujet d’un des plus grands mathématiciens du XX e siècle, Alexandre Grothendieck. Récoltes et Semailles, réflexions et témoignage sur un passé de mathématicien, est un texte de près de mille pages écrit entre 1983 et 1986 où Grothendieck décrit son parcours intellectuel.

Signalons qu’une version de Récoltes et Semailles est disponible en ligne.

Commençons par cet interview de Jean-Pierre Bourguignon et Cédric Villani (Médaille Fields 2010) sur France Inter le 21 janvier 2022 à l’occasion de la sortie en librairie de Récoltes et Semailles.

Commençons par la fin…

Le 13 novembre 2014, Alexandre Grothendieck meurt à l’hôpital de Saint-Girons en Ariège. Il a 86 ans. Fâché avec tout le monde, même avec ses voisins depuis plus de vingt ans, il vit en ermite dans une petite maison où personne ne peut rentrer au cœur des Pyrénées, à Lasserre en Ariège.

Malgré la relative indifférence dont il faisait l’objet, il s’agit bien d’un des plus grands mathématiciens du XX e siècle qui disparaît ce jour-là. Un scientifique exceptionnel, que beaucoup compare à Albert Einstein, qui a eu une influence capitale sur les mathématiques des années 60 et qui permettra à certains de ses illustres élèves d’obtenir par la suite la prestigieuse Médaille Fields. Cédric Villani dit des mathématiques d’avant Grothendieck qu’elles sont comparables à la biologie avant la découverte de l’ADN !

En 2012, Yves Le Pestipon, professeur à Toulouse et Catherine Aïra partent sur les traces de ce personnage surprenant dans un documentaire : Alexandre Grothendieck, sur les routes d’un génie. 

Un mathématicien hors du commun

Né le 28 mars 1928, Alexandre Grothendieck a une enfance particulière. Son père, Sacha Schapiro, est un anarchiste militant ukrainien contre l’empire tsariste (une histoire qui nous rappelle des événements récents). Sa mère, Hanka Grothendieck, est une journaliste allemande. Les activités politiques de ses parents conduisent Alexandre à être séparé de ses parents dès 1934 puis interné au camp de Rieucros en Lozère en 1940. D’origine juive, son père est déporté à Auschwitz en 1942 où il mourra rapidement. Alexandre est caché au Chambon sur Lignon où il sera scolairisé au collège Cévenol jusqu’à son baccalauréat à la fin de la guerre.

Il retrouve sa mère à la fin de la guerre et ils s’installent à Vendargues près de Montpellier où ils vivent modestement avant de s’installer à Paris en 1948 pour commencer des études de mathématiques. Il est adressé par un de ses professeurs à Élie Cartan puis participe aux séminaires de l’École Normale Supérieure grâce à Henri Cartan. Il se retrouve ainsi auprès de Jean Dieudonné et Laurent Schwartz à Nancy où se développe à cette époque l’analyse fonctionnelle.

 La légende Grothendieck commence à cette période. Les deux éminents mathématiciens proposent à Grothendieck une liste de 14 problèmes non résolus et lui demandent d’en choisir un. Grothendieck revient auprès d’eux quelques mois plus tard. Il les a tous résolu !

Entre 1950 et 1953 il rédige l’équivalent de six thèses. Il choisit un de ces articles, Produit tensoriel topologique est espaces nucléaires, pour soutenir sa thèse. Apatride, il refuse d’effectuer son service militaire ce qui l’empêche d’accéder à un poste dans la fonction publique. Entre 1953 et 1956 il part enseigner au Brésil puis aux États-Unis.

Après son travail reconnu en analyse fonctionnel, de retour à Paris en 1956, il se tourne vers la géométrie algébrique où il collabore avec Jean-Pierre Serre. Il est ensuite accueilli à l’Institut des Hautes Études Scientifiques où il entreprend de construire une théorie de la géométrie algébrique avec Jean Dieudonné et René Thom. Il rédige à ce sujet Éléments de géométrie algébrique qui marque le fondement de cette théorie et reste inachevé à ce jour.

Il devient membre du groupe Bourbaki en 1953. Il faut lire à ce sujet l’article dédié à sa disparition publié par ce groupe légendaire.

Jean-Pierre Serre et Alain Connes au sujet d’Alexandre Grothendieck en janvier 2019.

Il obtient la Médaille Fields en 1966, mais il refuse de se rendre en URSS pour la recevoir.

Fin de sa carrière institutionnelle et sa vie de militant

La guerre du Viet Nam et le printemps de Prague en 1968 le conduisent vers les milieux contestataires. Il claque la porte de l’IHES en 1970 pour fonder le groupe politique et écologiste Vivre et Survivre avec deux autres mathématiciens. Ce groupe très en avance sur son temps visait à « la lutte pour la survie de l’espèce humaine, et même de la vie tout court, menacée par le déséquilibre écologique croissant causé par une utilisation indiscriminée de la science et de la technologie et par des mécanismes sociaux suicidaires, et menacée également par des conflits militaires liés à la prolifération des appareils militaires et des industries d’armement ».

Lire aussi cet interview d’un ami de Grothendieck qui éclaire son parcours.

Il obtient un poste de professeur associé au collège de France en 1971. Il fonde ensuite une communauté dans l’Hérault et devient professeur à l’université de Montpellier jusqu’à sa retraite en 1988.

À écouter, une conférence audio de Grothedieck en 1972 au CERN : Allons-nous continuer la recherche scientifique ? Deux heures et demie avec sa voix !

En 1988, il refuse le prix Craaford, il précise que son salaire de professeur […], est beaucoup plus que suffisant pour [ses] besoins matériels ; que les chercheurs de haut niveau auxquels s’adresse un prix prestigieux comme le prix Crafoord sont tous d’un statut social tel qu’ils ont déjà en abondance et le bien-être matériel et le prestige scientifique, ainsi que tous les pouvoirs et prérogatives qui vont avec et qu’il s’est éloigné du milieu scientifique depuis 1970 et la récompense porte sur des travaux vieux de vingt-cinq ans.

Malgré son éloignement des mathématiques institutionnelles, Grothendieck continue à publier durant les années 80 des articles qui vont avoir une influence importante sur le milieu mathématique.

Un des enfants de Grothendieck, lui-même mathématicien, parle de son père en 2017.

Lire l’article de GQ repris dans sur le site Images des Maths du CNRS.

Influence de Grothendieck en mathématiques

Dans son autobiographie, il classe ainsi ses contributions majeures (par ordre chronologique d’apparition) :

Pendant ces années d’ermite, Grothendieck accumule les cartons avec ses notes manuscrites. En 2017, l’université de Montpellier reçoit 18000 pages manuscrites réparties en 35 cartons.

On peut retrouver certaines de ces archives sur le site dédié de l’université de Montpellier.

Livres au sujet de Grothendieck

Récoltes et Semailles — Alexandre Grothendieck — Édition 2022 — Gallimard

Alexandre Grothendieck, Sur les traces du dernier génie des mathématiques — Philippe Douroux — 2016 — Allary.

Alexandre Grothendieck, Itinéraire d’un mathématicien — 2016 — Bringuier — Privat

Algèbre, Élément de vie d’Alexandre Grothendieck — 2016 — Yan Pradeau — Éditions Allia

Notes de lecture sur Récoltes et Semailles

Je suis en pleine lecture de Récoltes et Semailles et voici quelques passages notables :

Au sujet de sa recherche d’une définition des longueurs, aires et volume… une théorie de la mesure

Ce qui me satisfaisait le moins, dans nos livres de maths, c’était l’absence de toute définition sérieuse de la notion de longueur, d’aire, de volume. Je me suis promis de combler cette lacune, dès que j’en aurais le loisir. J’y ai passé le plus clair de mon énergie entre 1945 et 1948

En m’y mettant, à l’âge de dix-sept ans et frais émoulu du lycée, je croyais que ce serait l’affaire de quelques semaines. Je suis resté dessus pendant trois ans. J’ai trouvé même moyen, à force, de louper un examen, en fin de deuxième année.

Mon informateur, Monsieur Soula, m’assurait aussi que les derniers problèmes qui s’étaient encore posés en maths avaient été résolus, il y avait vingt ou trente ans, par un dénomé Lebesgue.

Toujours est-il qu’à aucun moment je n’ai été effleuré par la pensée d’aller dénicher le livre de ce Lebesgue dont Monsieur Soula m’avait parlé, et qu’il n’a pas dû non plus jamais tenir entre ses mains. Dans mon esprit, il n’y avait rien de commun entre ce que pouvait contenir un livre, et le travail que je faisais, à ma façon, pour satisfaire ma curiosité sur telles choses qui m’avaient intrigué.

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Le blog de Fabrice ARNAUD — Licence CC BY-NC-SA 4.0


Mes calculatrices préférées au collège et au lycée

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Mes casse-tête mathématiques

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